samedi 18 janvier 2014

Comment le flic de base peut utiliser le racket de l'outrage pour arrondir ses fins de mois

En septembre 2009, dans un reportage de Stéphane Bentura sur Envoyé spécial (France 2), un policier de Lyon multirécidiviste des poursuites pour outrage "passait aux aveux": oui, le flic de base, peut, s’il le souhaite et si les scrupules ne l’étouffent pas, utiliser le racket de l'outrage pour arrondir ses fins de mois. La situtation ne s’est pas arrangée depuis. Elle s’est même dégradée. C’est l’Inspection générale de l’administration (IGA) qui le dit, dans un rapport récent. Certains policiers abusent. Et cela coûte cher, très cher, à l’administration, qui prend systématiquement en charge les frais d'avocat des policiers déposant une plainte pour outrage. Une brèche vers la dépénalisation du délit d’outrage?
Le CODEDO vient d’écrire à la garde des Sceaux, Christiane Taubira, en lui demandant d’inscrire la dépénalisation du délit d’outrage dans le cadre de sa réforme de la Justice.

La "Lettre au garde des Sceaux pour une dépénalisation du délit d'outrage" envoyée à Christiane Taubira

Publiée en 2008, à l’époque où le délit d’outrage était utilisé comme une arme politique par le pouvoir sarkozyste, la Lettre au garde des Sceaux pour une dépénalisation du délit d’outrage de Romain Dunand et Jean-Jacques Reboux avait été envoyée à Rachida Dati, puis à Michèle Alliot-Marie.
La première ne nous a jamais répondu. Pas plus qu’elle n’avait jugé bon de répondre à la pétition du CODEDO demandant la dépénalisation du délit d’outrage, signée par 30.000 personnes, remise le 15 février 2010 à la Chancellerie, à l’Elysée et au ministère de l’Intérieur. En l’absence d’une réponse de la seconde, nous n’avions pas cru bon d’envoyer cet ouvrage à leur successeur Michel Mercier.
À l’occasion de la publication du rapport de l’Inspection Générale de l'Administration (IGA) dénonçant les petits bénéfices engrangés par certains policiers grâce à leurs plaintes abusives pour outrage et le coût exorbitant de la prise en charge systématique par la République des frais d'avocat des policiers (+ 40% en 3 ans), ce petit livre, toujours d'actualité, vient d’être envoyé à Mme Christiane Taubira, qui s’apprête à entamer une réforme ambitieuse de la justice française, dans laquelle la dépénalisation de ce délit obsolète et inique pourrait être une jolie "figure de proue". Aux 10 raisons invoquées en 2008 pour défendre cette dépénalisation s’en ajoute une 11ème : faire faire des économies à la République car, comme le précise ce très éclairant article du Parisien, l’indemnisation des agents coûte trop cher !
Rappelons que si nous n’avons rien obtenu quant à la dépénalisation du délit d’outrage, notre action a permis, grâce notamment à l’action de Hervé Éon, d’obtenir l’abrogation du délit d’offense au président de la République.

Quand l'Inspection générale de l'administration dénonce les abus des policiers indemnisés dans le cadre du délit d'outrage

Le délit d'outrage et les petits avantages en nature qu'en tirent certains policiers (dont les frais d'avocat sont systématiquement pris en charge par l'administration) continuent de bien se porter! Ce n'est pas le CODEDO qui le dit, mais l'Inspection générale de l'administration (IGA) dans un rapport s’inquiétant (notamment) que certains policiers victimes d’injures «habitués de la protection fonctionnelle» saisissent systématiquement et de manière répétée et abusive la justice afin d'obtenir, avec succès, des dommages et intérêts (chaque dossier coûte en moyenne 1.000€ à l'administration), le record étant établi par un policier qui a porté plainte pour outrage à 28 reprises en 2012.
La suite sur le Parisien.fr.
Ces abus n’existent quasiment pas dans la gendarmerie, comme le note  L'Essor de la Gendarmerie, qui met le rapport en ligne sur son site (les abus concernant le délit d'outrage sont en p. 61).